2014 : la loi Hamon face aux dark-patterns

2014 démarre par l’adoption de la loi Hamon, adoptée en mars, et qui renforce de manière imparfaite mais essentielle les exigences relatives à la transparence de l’information et au consentement explicite des utilisateur.trice.s, tout en luttant contre les pratiques numériques délibérément trompeuses. Dans mon cas, les dark patterns se matérialisaient dans des stratégies de manipulation, qu’elles soient éditoriales ou ergonomiques, qui :

  • poussaient l’utilisateur.trice à commettre des actions impulsives : “j’y vais !” écrit en gras et grand dans les call-to-actions, ou des nudges avec “X visiteurs ont vu cette chambre dans les dernières heures”, par exemple,
  • provoquaient une perte de ses repères temporaux : les scroll infinis, les lectures automatiques, les “It only takes 1 minute to fill out this form”,
  • opacifiaient une information textuelle cherchant à rendre plus complexe la compréhension d’une phrase : par exemple, une phrase permettant la désinscription à une newsletter utiliserait une série de mots négatifs “Pour ne pas continuer à recevoir nos passionnants emails, ne pas cliquer ici.”,
  • présentaient des information invérifiables : les “Best price guaranteed”,
  • voire douteuses ou carrément fausse : “Free and easy 30-day return”,
  • empêchaient quelques actions : des surfaces de clic trop petites pour nos doigts,
  • et en cachaient d’autres : des cases pré-cochées cachées dans un bloc dépliant plié.

et toute une gamme de manipulations du même acabit qui visaient à inciter l’utilisateur.trice à accomplir des actions qu’il ou elle n’aurait pas nécessairement entreprises de son propre gré. Et qui n’étaient pas forcément de son intérêt, non plus (d’ailleurs, son intérêt étant très secondaire).

Bien que la loi Hamon n’ait pas été en mesure, à elle seule, d’éradiquer complètement l’utilisation massive de subterfuges plus subtils qu’une simple case précochée dans un formulaire, elle a toutefois réussi à mettre un terme à un certain nombre de pratiques abusives courantes dans le domaine du web marketing.

Si aujourd’hui, la création de supports numériques exempts de tromperies et de manipulations, est au cœur de mon travail et de ma mission en tant que formatrice, à cette époque, la loi Hamon a seulement court-circuité mes productions peu vertueuses avec ses règles trop éthiques… – et dura lex sed lex. 

Cependant, même si j’abandonnais l’utilisation de certains dark patterns sous contrainte, le grand bénéfice de cette loi pour moi a été de consigner noir sur blanc certaines de mes pratiques (pour mieux les rendre illégales). Sur le plan moral, cela a marqué le début d’une réflexion plus structurée sur mes responsabilités et à contribué à ma décision de quitter l’univers du web marketing. 

La loi Hamon a également fourni aux utilisateur.trice.s finaux.les des outils adaptés pour exercer leurs droits, notamment à travers la diffusion de formulaires très pédagogiques sur le site de la CNIL intitulés : “Adresser une plainte”, etc., ainsi qu’une page intitulée “Vos droits en question” – la plainte en question passible d’être adressée contre quelqu’un.e.s de mon entourage professionnelle…


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